Renaissance Italienne

Période sans égale, la Renaissance Italienne nous a laissé un héritage Artistique et Culturel d'exception. Ce David de Michel Ange devant le Palazzo Vecchio, dont l'original est au musée de l'Académie, pourrait en être le symbole.

J'en connais mille. Pourquoi en faire la liste? Elle serait forcément exhaustive.

Comment dissocier une œuvre d'une autre? La production de cette époque est homogène, elle semble posséder un continuum latent. Sorte de code génétique constitutif d'une marque de fabrique "Renaissance". Un patrimoine oublié remis sur le chemin de la création artistique d'une époque merveilleuse.

C'est l'ensemble de la production artistique qui est à considérer comme la représentation de cette période.

A défaut d'omettre une seule de ces œuvres, c'est un choix de mes coups de cœurs que je vous propose ici.

 


Léonard de Vinci


   

 

 


Les aventures méconnues de Léonard de Vinci à Romorantin

A la demande de François 1er, Léonard de Vinci s’était lancé dans un projet colossal:

faire de Romorantin une capitale.

Une exposition raconte cette étonnante histoire inachevée.

Plan du palais et de l'avant-cour dans le codex Atlanticus de Léonard de Vinci (portrait à gauche). (Exposition Léonard de Vinci à Romorantin) 
Plan du palais et de l'avant-cour dans le codex Atlanticus de Léonard de Vinci.

Romorantin, 18.242 habitants, commune du Loir-et-Cher, est-elle passée à côté d’un destin national?

Cette ville solognote aurait pu devenir la Capitale du Royaume de France sous le règne de François 1er, qui en avait confié le projet architectural à Léonard de Vinci en 1516. C'est l’étonnante histoire que relate une exposition qui s’ouvre le 9 juin 2010 dans les deux musées de Romorantin.

Même si des dessins du très célèbre maître italien révèlent des plans de palais pour Romorantin, l’idée d’un projet de transformation plus vaste de la ville, destinée à devenir capitale du Royaume, en laissait plus d’un sceptique. Pourtant, tant les recherches dans les archives que celles faites sur le terrain révèlent que le plan ambitieux de François 1er n’est pas resté à l’état de projet. La réalisation avait commencé.

Une cité lacustre

Dans les codex de Léonard de Vinci, le Vincien Carlo Pedretti (Université de Los Angeles, Etats Unis), a découvert les plans du «palais neuf» de Romorantin, édifice imposant situé sur une île, sur les bords de la Sauldre, raccordée par deux ponts au reste de la ville. Des écuries intégrant un ingénieux système de nettoyage, un pavillon de chasse pour la forêt de Bruadan, et surtout des projets de réaménagement de la rivière et des voies navigables de la région. . . L’ensemble est ambitieux.

Rejoindre le Rhône

A 64 ans, Léonard de Vinci se lance dans un chantier colossal visant à assainir la ville, à éviter les eaux stagnantes et à relier la Sauldre au Cher. Les dessins retrouvés dans deux codex décrivent la construction d’un canal. Or le tracé de Vinci coïncide avec celui d’une petite rivière, le Mabon, situé à l’Est de Romorantin, qui se dirige vers Villefranche, la direction choisie par Léonard de Vinci.

Les croquis révèlent une ambition digne d’un pharaon : creuser des voies navigables reliant le centre de la France à l’axe formé par le Rhône et la Saône.

                                                                              Dessin de résidence au bord de l'eau.

Des travaux financés par un grenier à sel. A Romorantin même, les archives municipales ont gardé la trace des ambitions de François 1er. Ainsi l’équipe de Pascal Brioist, du Centre de la Renaissance de Tours, a découvert dans les comptes de la ville des travaux de terrassements au moment ou Vinci est présent, entre 1516 et 1518, travaux financés par un impôt sur le sel. Des sondages archéologiques ont été entrepris pour dater le terrassement situé au-dessus de la Sauldre.

Faire de Romorantin une capitale n’était donc pas seulement un projet sur le papier. Cependant tout s’arrête en 1519, sans doute à cause de la mort de Léonard de Vinci en Mai de cette année-là. François 1er construit alors le plus fameux de ses châteaux à Chambord.
Cécile Dumas
05/06/10

Romorantin accueillait les 3, 4 et 5 Juin un colloque international sur Léonard de Vinci. L’exposition «Romorantin : le projet oublié de Léonard de Vinci» est ouverte au public du 9 Juin 2010 au 30 Juin 2011, au musée de Sologne et à l’Espace automobiles Matra.


La Vinci 812 et pourtant elle roule   

JOZSEF Eric à Florence, envoyé spécial

Dans la ferveur nationaliste entretenue par le fascisme de l'Italie d'avant-guerre, le dessin avait été présenté en 1936 comme «la Fiat de Leonardo». Mais le schéma détaillé de Léonard de Vinci d'une structure carrée en bois et en métal, composée de multiples ressorts, arbalètes et engrenages et posée sur trois roues, n'avait toujours pas livré son secret. Chariot, machine autopropulsée ou première voiture de l'Histoire ? Durant des lustres, les scientifiques comme les spécialistes de l'artiste et ingénieur italien ont buté sur l'interprétation du dessin répertorié sous le numéro 812 dans le Codex Atlantique, ce recueil des croquis de machines, études géométriques et calculs de Léonard de Vinci. Faute de parvenir à expliquer le fonctionnement de l'engin, ils ont multiplié les hypothèses, soupçonnant l'existence de pièces absentes du graphique original, n'hésitant pas, au besoin, à inventer quelques éléments supplémentaires pour accréditer leurs thèses.

Depuis 1478, le mystère restait entier. D'un petit rire léger, Carlo Pedretti en livre la clé : «Il n'y a pas le moindre secret...» Ce professeur de 76 ans a trouvé la solution. Directeur à Los Angeles du centre Armand Hammer pour les études sur Léonard, il a consacré sa vie au maître né à Vinci en 1452. Et aujourd'hui, sur la base de ses conclusions, le musée d'Histoire de la science de Florence offre au visiteur une maquette (1) en état de marche de «l'automobile de Léonard», capable de parcourir entre vingt et quarante mètres.

Il a quand même fallu plus de vingt-cinq ans à Carlo Pedretti pour résoudre cette énigme. «C'est en 1957 que pour la première fois je me suis intéressé au feuillet 812», se souvient-il. A l'époque, l'idée selon laquelle ce sont les arbalètes qui propulsent le véhicule est unanimement partagée, depuis qu'en 1905 un autre spécialiste de Léonard, Gerolamo Calvi, a signalé, après des siècles d'oubli, ce dessin du maître italien. Alors qu'il était livré aux imaginations fertiles, le feuillet 812 était l'objet de toutes les récupérations. Au début du XXe siècle, les positivistes faisaient de la disparition du carro semovente (char automoteur) de la mémoire collective le symbole du déclin de la pensée scientifique depuis la Renaissance. Sous le régime mussolinien, la structure était hissée au rang d'ancêtre de la voiture : les fascistes voulant mettre en avant le «génie italien». C'est d'ailleurs par la volonté de Mussolini qu'est réalisée, en 1939, la première maquette de «l'automobile de Léonard». Plus tard, d'autres modèles seront construits et exposés, sans que quiconque arrive à répondre à la question : comment les arbalètes, bien visibles dans le dessin de Léonard, peuvent-elles transmettre l'énergie nécessaire à la locomotion du véhicule ?

La force est ailleurs

C'est un dessin anonyme du début du XVIe siècle, reproduisant une série de mécanismes de Léonard, qui en 1975 met Carlo Pedretti sur la piste. Le professeur le découvre dans les archives du musée des Offices de Florence, c'est le tournant décisif. «De ces croquis j'ai tiré la conclusion que la force provenait d'ailleurs : de deux ressorts à lame dont on ne voit que la trace sur le dessin.» En effet, seuls quelques légers traits de crayon laissent deviner la présence de ces ressorts. Carlo Pedretti mentionne son interprétation dans une note. Vingt ans plus tard, sa rencontre avec l'ingénieur Mark Rosheim lui permet de vérifier l'hypothèse. Collaborateur de la Nasa, notamment pour la sonde Spirit destinée à explorer Mars, le spécialiste en robotique traduit le dessin de Léonard en une figure en trois dimensions. Grâce aux moyens modernes et notamment à la modélisation par ordinateur, toutes les pièces ­ dont certaines avaient été mises en évidence par Léonard lui-même ­ sont isolées, de manière à être ensuite fabriquées. «Le dessin de Léonard était pratiquement parfait. Il assemble des éléments très divers pour élaborer un mécanisme très complexe. Nous n'avons été obligés de reprendre que de petits détails», souligne Paolo Galluzzi, le directeur du musée florentin, qui s'émerveille : «L'ensemble s'explique uniquement par le dessin, il n'y a pas un seul mot, ni la moindre annotation sur le feuillet 812.» Très sophistiqué, le système, inspiré des mécanismes d'horlogerie, est doté d'éléments pour réguler la vitesse et d'un frein qui, une fois désactivé, permet de donner le départ au véhicule. Il est aussi possible d'orienter le mouvement de l'engin de manière qu'il accomplisse un virage.

Une machine à «effet spécial»

Plutôt qu'une voiture, la machine de Léonard est à l'image de ces voitures-jouets mues par un ressort que les enfants frottent par coups successifs sur le sol avant de les voir s'élancer. Plus qu'un objet utilitaire, le "carro semovente" était sans doute une attraction. «Il est vraisemblable qu'il ait créé cette mécanique pour un spectacle, même si on ne dispose d'aucun témoignage», indique le directeur du musée. Paolo Galluzzi rappelle qu'en 1510 Léonard avait construit, à l'occasion de la visite de François Ier au comité des banquiers florentins de Lyon, un lion de papier sur un principe d'horlogerie similaire. A proximité du roi, l'animal ouvrait sa poitrine d'où sortaient des fleurs de lys. L'engin de la planche 812 ne serait donc qu'un élément d'ambiance, destiné à créer un effet spécial lors de l'une des nombreuses fêtes données dans le grand-duché de Toscane. «C'était le Steven Spielberg de l'époque», sourit le directeur du musée florentin, qui estime que le cadre en bois de l'«automobile» devait être surmonté d'un décor. Le frein devait même être actionné en cachette pour libérer le véhicule, surprendre les convives et renforcer la réputation de magicien entourant l'artiste.

Quelques années avant l'invention de Léonard, l'architecte, sculpteur et scientifique florentin Filippo Brunelleschi avait construit des machines de ce type, dont un ange automate pour une fête de l'Annonciation. Dans l'atelier d'Andrea Verrocchio, où dès l'âge de 16 ans il est apprenti, Léonard consulte les dessins de Brunelleschi et développe notamment les travaux et les études d'horlogerie. Ressorts, arbalètes, vis et cames... «Léonard transpose ce monde de l'horlogerie vers des techniques et des mécanismes plus complexes, mais en conservant l'aspect de l'automation dont il est une sorte de prophète», dit Paolo Galluzzi. En 1478, Léonard quitte l'atelier de Verrocchio et s'établit à son compte, prêt à répondre aux demandes d'effets spéciaux du marché. A seulement 26 ans, il crée donc l'«automobile» aujourd'hui reconstruite et exposée.

«Cette réalisation nous permet de mieux comprendre les mécanismes employés par Léonard, estime Carlo Pedretti. Elle nous aide aussi à mettre un terme à l'image répandue du génie universel. Il faut replacer Léonard dans le contexte de son époque et dans une juste position historique. Il n'est pas isolé, au contraire, c'est un homme de son temps qui puise aussi dans les expériences de l'Antiquité.» Mais, au fil des siècles, les innombrables travaux de l'artiste ont été en partie dispersés, voire perdus comme ses appareils scénographiques, rendant sa figure mystérieuse et ses études parfois incompréhensibles. Alors qu'au contraire «c'était le plus grand des communicateurs de son temps, s'enthousiasme le Pr Pedretti. Sa technique du dessin avec des plans de coupes, des vues en transparence, du dessus, de côté, ou explosées, était proche du tridimensionnel.» «C'est l'inventeur du dessin technologique, renchérit Paolo Galluzzi. Il n'y a pas de langage graphique comparable chez ses contemporains. D'ailleurs, il utilise les mêmes éléments pour ses études anatomiques ou la peinture ; il emploie les mêmes règles de perspective ou encore des traits plus ou moins appuyés.»

Des centaines de dessins à décrypter

A la mort de Léonard à Amboise, en 1519, «ses idées ont continué de circuler en Europe», indique Carlo Pedretti, mais certaines planches ont été égarées et «on a fini par perdre son langage». Les cahiers de l'ingénieur, récupérés au XVIe siècle par l'artiste Pompeo Leoni, ont été démembrés, les planches séparées et reclassées par thèmes pour former, entre autres, le Codex Atlantique aujourd'hui conservé à la bibliothèque Ambrosienne de Milan. L'héritage de Léonard s'est dispersé.

A l'avenir, Paolo Galluzzi entend modéliser d'autres travaux de Léonard. Déjà, plusieurs des projets du polyvalent maître italien ont été fabriqués (2). «On a par exemple pu constater que les excavatrices dessinées par Léonard étaient très efficaces, rappelle le Pr Pedretti. En revanche, son hélicoptère est avant tout une sorte de jouet. On peut lui donner une impulsion initiale, mais pour qu'il vole véritablement il faudrait ajouter un dispositif de compensation.» Des centaines de manuscrits restent à décrypter. Selon les experts, moins d'un cinquième de ses créations ont été analysées. «Il y a encore beaucoup de machines dont on ne connaît pas l'usage», remarque le directeur du musée. Mais «il n'y a pas de secret de Léonard, poursuit Carlo Pedretti. Simplement, le Léonard scientifique n'est pas assez étudié».

Si la résolution de l'énigme de l'«automobile» ne change pas substantiellement le regard que l'on porte sur le maître italien, elle rappelle, souligne le directeur du musée de la Science, que «derrière tous ces travaux sur les mécaniques complexes, il faut y voir une philosophie, celle de libérer l'homme de la nature et de la fatigue du travail.» Et de les distraire.

(1) Exposé jusqu'au 5 juin 2010 à l'Istituto e Museo di Storia della Scienza, 1, piazza dei Giudici, 50122 Florence. Tél. : 055 26 53 11. brunelleschi.imss.fi.it/automobile/index. htm

(2) Visibles notamment au musée Le Clos-Lucé, demeure de Léonard de Vinci, 37400 Amboise.